Prurit vulvaire : pourquoi ça gratte ?

Très fréquentes, les démangeaisons  au niveau des parties  génitales sont vécues comme  un tabou et peu de femmes osent consulter  pour ce motif.  Elles préfèrent collectionner les applications de pommades souvent inadéquates.

L’envie de se gratter ou prurit, est une sensation désagréable qui peut s’accompagner parfois de  brûlure ou même de douleur. D’ailleurs selon le cas, on déterminer la cause du grattage. Ce dernier finit toujours par donner des lésions visibles à l’œil nu lors de  l’examen clinique  chez le médecin. Ce sont soit des  lésions localisées à type d’érosions, d’ulcérations ou de croûtes, lorsque le prurit est aigu ou très intense. Au cas où le prurit est chronique c’est toute la muqueuse qui s’épaissit, on dit qu’elle se « lichénifie ».

Les causes du prurit vulvaire

Chez la femme jeune, les candidoses vulvo-vaginales (champignons) sont les causes les plus fréquentes mais non exclusives de prurit vulvaire. Chez la femme âgée, le prurit est souvent chronique et la cause en est le plus souvent  due au lichen scléreux.

D’autres causes du prurit sont possibles, comme le  psoriasis, le lichen plan, et toutes les inflammations de la peau.

Les candidoses vulvo-vaginales

On dit souvent que plus de trois femmes sur quatre présenteront au moins un épisode de mycose génitale au cours de leur vie. Parmi elles, un certain nombre  feront des récidives fréquentes, qui deviendront chroniques. L’atteinte vulvaire est présente quasi-systématique.

Les signes qui orientent vers le diagnostic de mycose sont :

Un prurit aigu, vulvo-vaginal,  qui évolue par  poussées rythmées par le cycle menstruel. Ce prurit est favorisé par le stress, la prise d’antibiotique, un diabète et la corticothérapie locale ou générale.

En cas de surpoids, la candidose peut également siéger dans les grands plis (sous-mammaires, abdominaux) sous forme de placards érythémateux macérés.

On précisera que les mycoses génitales sont contagieuses ; c’est une des raisons pour lesquelles  il faut les traiter.

Le traitement des candidoses est avant tout un traitement antimycosique. L’application de corticoïdes locaux sur une candidose vulvaire peut, certes, soulager le prurit, mais fait évoluer ces candidoses vers la chronicité.

L’application de corticoides n’est pas conseillée, car l’aspect clinique de toute la région vulo-vaginale est alors remanié avec une  extension vers l’extérieur  des plaques érythémateuses vers la racine des cuisses.

Le lichen scléreux

Il  est beaucoup plus rare  que la mycose, mais se voit surtout  après la ménopause (vers 55 ans) . Le prurit est chronique, constant, parfois empêchant le sommeil. C’est dans ce cas que,  le prurit devenu très contraignant, les patientes vont consulter et faire le tour des  consultations  spécialisées, en gynécologie, en dermatologie  et même en allergologie. On ne connait pas tout à fait l’origine du LS, on pense qu’il s’agit d’une maladie  auto-immune. C’est l’organisme, sans qu’on sache pourquoi, qui se met à fabriquer en excès une substance nécessaire à la cicatrisation.  En tous cas, l’association à des maladies auto-immunes a été confirmée récemment.

Le LS est classiquement purement externe (vulvaire, périnéal, périanal), mais des atteintes internes sont possibles responsables de dyspareunie (douleur au moment des rapports sexuels)  par rétrécissement de l’orifice vaginal.

Les aspects cliniques du LS  sont très variés. On le reconnait par sa couleur blanche,  qui est  un élément constant. La forme typique présente sur les versants internes de la vulve,  une coloration blanche, brillante, nacrée et une atrophie des reliefs vulvaires. Cette  couleur blanche, ivoire, porcelaine touche le  clitoris, les faces internes des grandes lèvres et les petites lèvres. En surface, la muqueuse est sèche, fine et fragile. L’atrophie peut toucher le  clitoris jusqu’à sa disparition totale ! Les petites lèvres sont de taille réduite, parfois collées aux grandes lèvres ou ont totalement disparues. Au pire des cas,  toute la partie interne de la vulve peut disparaitre  et se réduire  à son orifice vaginal.

Le Traitement

Le lichen est traité par les corticoïdes. Mais il arrive que ça ne marche pas parce que  le traitement n’est pas correctement appliqué (trop faibles doses, pas au bon endroit). On reconnait l’aggravation s’il y a une accentuation de la blancheur des lichens scléreux.

Le lichen plan vulvaire

C’est une affection de la peau qui est  d’évolution chronique et  récidivante.  L’origine de cette maladie est également inconnue et serait due à une maladie auto-immune.

Cette  dermatose inflammatoire entraînant un prurit intense et des plaques violines brillantes souvent parsemées de stries branches ramifiées. Certains lichens plans peuvent évoluer vers une atrophie totalement similaire à celle du LS. L’aspect violine avec stries blanchâtres caractéristiques du lichen plan, doit alors être recherché en périphérie.

Il est moins fréquent que le LS.  Le prurit du LP est intense, avec un fond permanent et des périodes de recrudescence. Le lichen plan peut évoluer par poussées mais qui durent plusieurs semaines voire plusieurs mois.

Le LP dans sa forme classique s’accompagne souvent de plaques cutanées plus ou moins disséminées au niveau du corps. On les  recherchera préférentiellement à la face interne des poignets (papules violines brillantes prurigineuses pouvant évoluer vers la pigmentation).

Les poussées de lichen plan sont également induites par le stress et associées à certaines maladies auto-immunes (thyroïdite, pelade…).

Récapitulons

Au cours des mycoses et des lichens, le prurit peut s’accompagner de sensation de brûlures, de picotements, de douleurs et d’une dyspareunie.

– Les candidoses vulvo-vaginales sont les causes les plus fréquentes mais non exclusives de prurit vulvaire.

– Une atteinte vaginale et une contagiosité orientent vers une origine infectieuse, en particulier une mycose.

– Les mycoses évoluent par crises tandis que les lichens ont une évolution chronique.

– L’existence d’une pâleur ou d’une franche blancheur à l’examen oriente vers un lichen scléreux alors qu’un érythème évoque une candidose (voire un lichen plan).

– La présence d’une atrophie oriente vers un lichen scléreux et plus rarement un lichen plan.

– Les bords des lésions sont mal limités au cours des mycoses et bien dessinés dans les dermatoses.

En conclusion

Tout érythème vulvaire prurigineux doit être considéré comme une candidose jusqu’à preuve du contraire. En l’absence de preuve, un traitement antimycosique d’épreuve doit être tenté avant l’orientation vers le diagnostic de dermatose vulvaire (psoriasis, lichen plan) et l’application éventuelle de dermocorticoïdes. En cas de persistance une biopsie est nécessaire. Une blancheur vulvaire prurigineuse oriente vers le diagnostic de lichen scléreux.

Dans tous les cas, le grattage modifie souvent l’aspect clinique : le prélèvement myco-bactériologique, biopsie des zones les plus atteintes et arrêt de tout traitement dans l’attente des résultats est souvent la meilleure option thérapeutique dans ces pathologies chroniques et récidivantes.

Dr Samira Rekik

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